Emballages alimentaires en fibres végétales: vraie alternative au plastique?

Alors que la transition vers des alternatives aux plastiques s’accélère, notre étude questionne la durabilité de ces nouveaux emballages et invite à une vigilance accrue quant à leur composition ainsi que leur impact réel.

Ces dernières années, la lutte contre les plastiques à usage unique s’est intensifiée en France et en Europe. La loi anti-gaspillage pour une économie circulaire (AGEC) vise à supprimer ces plastiques d’ici 2040, avec des interdictions progressives. Depuis 2020, la vaisselle jetable en plastique est bannie de la vente aux particuliers, et depuis janvier 2023, son usage est interdit en restauration sur place pour les établissements servant plus de 20 couverts.

Cependant, les emballages jetables restent autorisés pour la vente à emporter. À l’échelle européenne, le règlement Packaging & Packaging Waste Régulation (PPWR), adopté en décembre 2024, impose une réduction des déchets d’emballage de 15 % d’ici 2040 et exige que la vente à emporter propose des alternatives réutilisables ou permette aux consommateurs d’apporter leurs propres contenants.

Toutefois, malgré ces mesures, tous les emballages jetables restent autorisés sous la pression des lobbies industriels.

Cinq emballages passés au crible

Face à cette évolution réglementaire et à la demande croissante de solutions durables, les emballages alimentaires à base de fibres végétales (papier kraft, carton, bagasse) se développent fortement.

Mais ces alternatives sont-elles réellement sans danger pour la santé et plus respectueuses de l’environnement ? Pour évaluer leur sécurité et leur impact, la CLCV a étudié cinq emballages à base de fibres végétales (analyses en laboratoire) commandés sur des sites fournissant la restauration à emporter. On y retrouve une barquette en bagasse (pulpe de canne à sucre), une boîte à pizza en carton ondulé, un pot à soupe, une boîte à pâtes et un emballage pour burger en papier kraft. Les tests ont porté sur la présence de substances indésirables, notamment des composés perfluorés (PFAS), des bisphénols et des phtalates, particulièrement préoccupants lorsque les aliments sont exposés à des températures élevées et en contact prolongés avec ces matériaux.

Des substances nocives détectées

Des niveaux élevés de PFAS ont été détectés dans la bagasse. Les PFAS, utilisés pour leurs propriétés imperméabilisantes, sont des polluants persistants aux effets indésirables sur la santé (cancers, troubles hormonaux, etc.). La barquette en bagasse testée contenait 1570 mg de fluor organique total par kilogramme de papier/carton. Un niveau plus de 30 fois supérieur à la limite fixée par le règlement européen PPWR. Ce dernier n’est pas encore appliqué partout en Europe.

Les bisphénols et phtalates, couramment présents dans les plastiques, sont aussi retrouvés dans des emballages en papier/carton. Dans notre échantillon, parmi les trois bisphénols et sept phtalates recherchés, seul du bisphénol A (BPA) a été détecté dans une boîte à pizza, probablement en raison de l’usage de carton recyclé. La France interdit le BPA dans les emballages alimentaires depuis 2015, et une réglementation européenne de 2024 étend cette interdiction à tous les matériaux en contact avec les aliments.

Une réglementation insuffisante

Les résultats de notre étude montrent que la migration de substances indésirables depuis les emballages alimentaires en fibres végétales n’est pas maîtrisée. Une récente étude suisso-américaine a trouvé 3600 substances issues de ces matériaux dans des échantillons biologiques humains (sang, urine, cheveux, lait maternel).

L’absence de normes spécifiques pour ces matériaux crée un vide juridique, rendant difficile le contrôle de ces migrations.

Un problème aggravé par une mauvaise prise en compte des perturbateurs endocriniens et par l’utilisation de matériaux recyclés, qui peuvent contenir des contaminants non éliminés lors du recyclage. Par exemple, bien que les matériaux en plastique recyclé soient réglementés, ce n’est pas le cas pour le papier et le carton. Ces derniers peuvent contenir des contaminants (encres, huiles minérales, phtalates, etc.), dus à une élimination incomplète lors du recyclage. Cela crée un paradoxe : bien que l’économie circulaire avec des matériaux recyclés soit écologiquement bénéfique, elle peut augmenter l’exposition à des substances nuisibles pour la santé. Les résultats de nos analyses ne témoignent pas d’une infraction sanitaire en l’état de la réglementation mais soulignent un vide de normalisation qui semble inadapté au développement de ces emballages. Ils soulignent la nécessité d’un renforcement des réglementations pour garantir la sécurité des emballages au contact des aliments.

différents emballagesAlternative durable ou greenwashing ?

Les emballages à base de fibres végétales sont souvent perçus comme une alternative écologique aux plastiques à usage unique. Cependant, leur impact environnemental et leur recyclabilité – car ils représentent 40 % des déchets d’emballage en Europe – sont remis en question. Ces emballages contiennent souvent des revêtements plastiques ou d’autres additifs (agents blanchissants…) pour assurer leur fonctionnalité, ce qui complique leur recyclage et peuvent même les rendre non recyclables. Sans compter que leur recyclage implique des procédés chimiques complexes et ne garantit jamais une récupération totale des fibres. Leur production peut avoir un impact environnemental comparable, voire supérieur, à celui des plastiques en raison de la consommation d’eau et des rejets polluants. En conclusion, ces emballages ne sont pas forcément une solution durable, et la priorité devrait être donnée au réemploi plutôt qu’aux alternatives jetables.

Allégations environnementales contestables

« Écologique », « respectueux de l’environnement », « 100 % recyclable », « emballage bio », « matières naturelles biodégradables »… Les mentions fournies par les fabricants et les revendeurs d’emballages en ligne ne sont pas toujours conformes aux dernières réglementations en vigueur.

Des informations que nous avons retrouvées sur plusieurs des sites sur lesquels nous sommes procurés les emballages testés. Elles pourraient être considérées comme trompeuses pour les restaurateurs et, in fine, pour le consommateur final en charge du geste de tri. Une réglementation plus stricte sur les allégations environnementales est nécessaire pour éviter le greenwashing et garantir une véritable durabilité des emballages en fibres végétales.

Papier, kraft, bagasse… de quoi parle-t-on ?

Papier, kraft et carton Papier, kraft et carton proviennent de fibres végétales, principalement du bois. Le papier, le plus fin, résulte de fibres désagrégées et mélangées avec de I eau pour former une pâte, puis séchée en feuilles de papier. Le kraft est un type de papier qui subit un traitement spécifique pour être plus robuste. Le carton superpose plusieurs couches de fibres. Quant à la bagasse, résidu de canne à sucre, elle est mélangée avec de I’eau pour obtenir une pâte, qui est moulée et séchée pour fabriquer des emballages ainsi que des éléments de vaisselle (couverts, verres…).

3 conseils pour réduire l’impact santé des emballages à usage unique

Optez pour des contenants réutilisables comme des bocaux en verre ou des boîtes en inox pour transporter vos repas à emporter.

Transvasez votre plat dans un récipient en matériau inerte, tel que verre ou inox, pour le réchauffer plutôt que de le chauffer dans l’emballage.

Ne réemployez pas ces emballages ; ils ne sont pas conçus, comme leur nom l’indique, pour être utilisés plusieurs fois

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